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Noor-al-Islam, au cœur de l’océan Indien

Dans ce nouvel article, nous allons faire un voyage loin du continent européen tout en restant sur le territoire français. Nous allons sur l’Île Bourbon plus communément appelé l’Île de la Réunion situé au Cap dans le sud-ouest de l’océan indien.

De Gujarat à Saint-Denis

L’île de la Réunion compte 840 000 habitants dont 70 000 musulmans. La présence des premiers musulmans sur la capitale réunionnaise et plus particulièrement sur l’île remonte en 1763, au début de la colonisation. Parmi les 34 esclaves qui arrivent de l’Inde, l’un d’eux est qualifié de « more » ou « maure ». Ce terme était utilisé à l’époque pour désigner une personne musulmane.

Dans les cargaisons déversées sur l’Île se trouvaient des musulmans. Ces premiers arrivants ne pouvaient pratiquer leur religion dans l’habitat des colons puisque la religion imposée était le catholicisme et ils n’avaient pas encore de structures religieuses.

Il a fallu attendre l’arrivée des Gujaratis en 1850 pour pouvoir instituer l’islam à la Réunion. Appelés les « z’arabes », ces musulmans étaient originaires de l’Inde et venaient plus particulièrement de Gujarat (province nord-ouest de l’Inde). Ils faisaient partie d’une classe aisée puisqu’ils étaient commerçants.  

 

La 1ère mosquée de France

Dès 1892, ils décident d’acheter un terrain à Saint-Denis. Leur nombre s’élevait alors à 130 personnes dont hommes, femmes et enfants confondus.

En 1897, ils formulent la demande au gouverneur, de créer la mosquée de Saint-Denis. Celui-ci répond favorablement à cette demande très rapidement.

Une première mosquée en bois est érigée dans le quartier commerçant de Saint-Denis. La construction établie selon les plans d’un ingénieur indien dure sept ans.

 

La mosquée qui s’élève, de couleur blanche dont le style choisi par ses concepteurs présente beaucoup de similitudes avec l’architecture classique très en vogue dans l’île à l’époque : stricte symétrie de la devanture, arc en plein cintre des ouvertures, balustrades, colonnes et pilastres qui encadrent le porche…  Le souci majeur des pères fondateurs a été la discrétion. Ils ont veillé à respecter scrupuleusement les engagements pris en 1897. Leur objectif principal était de célébrer leur culte.

L’inauguration officielle eut le mercredi 29 novembre 1905, soit le 1er Chawwal 1323. Ce fût un évènement historique, car c’était la veille de la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État mais aussi le jour de la célébration de la fête de l’Eid-ul-Fitr.

 

Pour inaugurer cette toute première mosquée sur le territoire français, une grande fête fut organisée. Tous ceux qui souhaitaient y participer étaient conviés. Les non-musulmans également. De cette façon chacun pouvait constater qu’il n’y avait rien de secret et que c’était un lieu de culte comme les églises et les temples. Le Prince Saïd Ali des Comores qui était en exil à la Réunion à ce moment, assista également à l’évènement.

 

Ainsi la Patrie créole témoigne :

« C’est avec une curiosité sympathique qu’un grand nombre de famille du chef-lieu ont répondu, avant-hier soir à l’aimable invitation de « l’Islam Bourbonnais » de venir à l’occasion de la clôture du Ramadhan et de la célébration de la fête du Baïram qui la suit, visiter leur magnifique mosquée de la rue du Grand Chemin.

(Baïram : nom turc de la fête de l’Eid-ul-Fitr)

Mais pénétrons, avec les invités, à l’intérieur du monument. Attention, il va falloir quitter nos chaussures si nous voulons gagner le parvis consacré. Des sandales de paille, de cuir et des espadrilles sont mises à la disposition des personnes qui craignent, pour leurs pieds nus, le contact glacé du stuc ou du marbre.

Nous vivons un conte des Mille et une nuits.

N’est-ce pas l’Orient cette salle d’une nudité sévère et qui respire cependant un air de fête. La colonie arabe est là, au grand complet ».

 

Aujourd’hui, la mosquée est majoritairement fréquentée par les hommes mais cela n’empêche pas les femmes de s’impliquer pleinement dans la religion. Ces ardentes pratiquantes se réjouissent d’avoir à leur disposition, une salle de prière, inaugurée courant 2005, qui leur est exclusivement réservée pour l’apprentissage du Coran.

Rénovation

La mosquée qui a été construite pour accueillir 150 personnes s’avère alors trop petite puisque sa communauté ne cesse d’augmenter. Un projet d’agrandissement est donc mis en place. Grâce à l’acquisition d’une parcelle en 1959, les travaux sont entamés en 1960 et dure 2 ans. L’objectif principal est d’agrandir la salle de prière (Djamate Khana) et la cour intérieure (Sahn). La superficie de la salle de prière passe après les travaux de 100m2 à 400m2, ce qui lui permet d’accueillir 500 fidèles. Soit 350 fidèles de plus. Le Mihrab se trouve quant à lui déplacé vers l’ouest sur ce nouvel axe et creusée dans le mur du fond de la salle de prière, qui fait face à l’entrée. Pour rendre visible la nouvelle entrée de la mosquée, qui ne se trouve plus au milieu de la façade, les arcs en plein cintre du rez-de-chaussée ont été enlevés.

Ces arcs ont également été remplacés à l’intérieur de l’édifice par des arcs en accolade, agrémentés dans le patio de vitraux bleus, blancs et rouges. C’est la seule note de couleur dans un édifice dominé par le blanc. L’édifice est constitué de deux corps de bâtiments reliés entre eux par une cour intérieure. Le coût de ces travaux s’est élevé à 24 millions de francs CFA.

Le 12 octobre 1974, un incendie éclate à l’étage du local commercial qui jouxte l’enceinte sacrée. La mosquée proprement dite (Djamate Khana et Sahn) est épargnée mais les bâtiments en bois situés en amont sont complètement ravagés. Des travaux s’imposent alors en façade.

Après plus de trois ans de travaux, les nouveaux bâtiments sont livrés en 1979. La salle de prière reste en l’état. Les commerces en bois attenant à la mosquée ainsi que l’ancienne façade datant de 1905 disparaissent pour faire place à une galerie commerciale longue de trente-huit mètres et profonde de quatre qui accueille six locaux commerciaux.

Ces locaux construits en partie en surplomb sur le trottoir, sont dotés de mezzanines. Une grande salle de réunion qui prend en partie appui sur la galerie sud du Sahn occupe tout le deuxième niveau auquel on accède par la cour intérieure. Le plus impressionnant reste le minaret et les claustras. La façade est en effet dotée d’un minaret qui culmine à 32 mètres et dont l’assise repose sur le toit en terrasse juste au-dessus de l’entrée.

La mosquée est majoritairement fréquentée par les hommes mais cela n’empêche pas les femmes de s’impliquer pleinement dans la religion. Ces ardentes pratiquantes se réjouissent d’avoir à leur disposition, une salle de prière, inaugurée courant 2005, qui leur est exclusivement réservée pour l’apprentissage du Coran.

Depuis plus de 3 ans, la mosquée subit un lifting de ces 1000 m2 de façade extérieure et de son minaret, dont les matériaux commençaient à vieillir. Ce projet est confié à l’architecte James How-Choong et l’inauguration se fera à la fin de l’année 2019 in Sha Allah.

Finance

La mosquée ayant été entièrement financée par la communauté musulmane, il fallait trouver des revenus suffisants pour payer à la fois l’imam, les enseignants coraniques et ceux qui entretiennent la mosquée. C’est la construction des lieux de commerce tout autour de la mosquée qui a permis ceci. Ce sont, par conséquent les revenus locatifs de ces commerces qui servent à financer l’entretien de la mosquée et le paiement de tous ceux qui y travaillent.

À côté de cela, il y a une Société Civile Immobilière (SCI) qui s’occupe de l’immobilier pour assurer des revenus pour le fonctionnement. Mais l’essentiel du revenu vient des dons des fidèles qui participe activement au fonctionnement de ces structures. La particularité du financement de la mosquée Nour-e-Islam mais plus généralement des mosquées à la La Réunion c’est l’auto-financement à 100%. Il n’y a pas de fond provenant des pays extérieurs.

 

Enseignement

La Grande Mosquée de Saint-Denis a un conseil d’administration composé de 25 personnes dont 75% de jeunes qui gèrent la mosquée, quelques salles de prière, des écoles confessionnelles (coraniques) et une école privée française Madersa Talim-Oule-Islam qui dispense un enseignement allant de la maternelle jusqu’à la primaire, au total 1200 élèves. Cet enseignement est dispensé en partenariat avec l’État, et les enseignants sont rémunérés celui-ci.

 

Mots de la fin

Cette mosquée en blanc et vert tendre, a une richesse spirituelle incomparable. Elle appartient à l’histoire de La Réunion plus généralement et de Saint-Denis plus particulièrement ainsi que du patrimoine national. Elle attire des touristes qui viennent du monde entier.

 

Merci à Saadati Djambae étudiante en école d’architecture qui nous a aidé à écrire cet article. 

Merci au site dédié à la mosquée

Credit photo : flickr

Vos réactions 1réaction(s)

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    Igbal 6 juin 2020

    Bien beau tout cela …
    Tout cela n’est que vitrine , facade , tout comme la nouvelle facade de la grande mosquée qui à coûter à la communauté une bagatelle de près d’un million d’euros! Alors que certains quartier sont dépourvus de mosquées ou lieux de culte …
    les mosquées sont vides aujourd’hui, les chargés autoproclamés des lieux , véritables dictateurs font fuir les derniers qui ont du bon sens , rallient les plus faibles ou Ceux de leur famille afin d’assouvir encore un peu plus chaque jour leur égos insatiables…
    De plus , aucun n’est savant ou même sachant : ils réduisent au silence ceux qui oseraient intelligemment affirmer que pour diriger une mosquée il faut avoir un minimum de bon sens et surtout des connaissances islamiques !
    Enfin , c’est une association de type 1901 : la communauté musulmane espère de tout coeur que de vrais dirigeants (des Imams) se mettent en place dans un futur très proche afin de redonner une lueur spirituelle et sincère à ses mosquées qui ressemblent en ce moment de jour en jour à des bazars …

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