• POSTÉ LE :
  • 0 RÉACTIONS

Rencontre avec le président de la mosquée de Massy

À l’heure où de plus en plus d’associations musulmanes se créent pour conduire les projets de construction de mosquées, très peu d’entre elles réussissent, et sont parfois heurtées à de nombreuses difficultés. C’est très souvent un processus qui s’étale sur de nombreuses années avant la réussite du projet.
C’est dans cette interrogation que nous sommes partis à la rencontre de Monsieur Yazid Madi le président du Conseil des Musulmans de Massy, dans le département du 91 en région parisienne. L’association a été créée le 7 mai 2003, et en 2016, en moins de 13 années, elle a pu ouvrir pour la première fois les portes de l’une des plus belles et des plus grandes mosquées de France qui fait aujourd’hui la fierté des massicois.

Quel ressentiment donnez-vous par rapport à ce processus de recolte de don pour la construction de la mosquée de Massy ?

Quand on a débuté, effectivement il y a toujours l’image qu’il faut demander l’aide des autres. Mais très vite on s’est rendu compte que le financement serait en majorité couvert par l’action local. Donc la majorité de notre financement est local.
Que de demander des rendez-vous, on s’est associé à certaines mosquées pour qu’il y ait des échanges. On a aussi fait des actions qui au départ, ça a marché plutôt bien. On allait dans les marchés pour pouvoir récolter de l’argent, puisque c’est là où il y a une forte communauté musulmane. Donc il y a eu ces actions là, il y a quand-même plus de 110 mosquées qui nous ont accueilli. Il y a vraiment dans la communauté une vraie volonté d’entraide, en tout cas on l’a ressenti de nôtre côté. Il y a même des mosquées qui nous ont accueilli plusieurs fois. Je pense à la mosquée de Mante-la-Jolie (78), la mosquée de Créteil (94), où nous on leur a prêté de l’argent, et ils nous ont ensuite aidé, ils nous ont même fait un chèque, il y a cette solidarité, il ne faut pas le nier.
Mais l’important à avoir à l’esprit que, le financement c’est un financement qu’il faut chercher en priorité en France, c’est un financement local. Il faut que les musulmans localement, soient impliqués dans leur projet, et que le projet soit en adéquation des besoins locaux. On ne peut prétendre à construire un projet à plusieurs millions d’euros, si localement la communauté est faible, ce n’est pas possible. Il faut que le projet soit en adéquation avec les besoins locaux de la communauté, également enfin que les moyens de financer disponibles ou qui seraient potentiellement disponible par la communauté locale.

Comment expliquez-vous dans les villes du sud, comme Marseille pour ne prendre qu’elle comme exemple, cette difficulté de conduire un projet de construction de mosquée ?

Je ne sais pas ce qu’il se passe de manière explicite dans le sud, mais j’ai deux expériences.
Nous avons fait tout un travail avec la municipalité pour qu’il y ait une adhésion au projet. Et pour qu’il y ait une adhésion au projet, il faut que les associations puissent se structurées, puissent ensuite discuter avec les autorités locales pour évoquer leur besoin qui est un droit. Et qu’elles demandent de l’aide aux autorités, et à partir de là, il y a un dialogue qui s’installe. 

« Pour se faire respecter, il faut aussi user d’un certains nombres de stratagèmes légaux pour se faire entendre « 

Dans notre cas ici à Massy, qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Il s’est passé tout simplement qu’au départ, il y avait une multitude d’associations, et la municipalité nous a fait comprendre qu’elle ne voulait pas une multitude d’interlocuteurs. Donc il était important que, les musulmans eux-mêmes s’unissent, se parlent, et s’accordent sur une marche à suivre. À partir du moment où il y a eu ce dialogue, à partir du moment où il y a ce travail, ensuite il y a eu la possibilité de rentrer concrètement dans le fond du problème. Et on a pu avoir le soutien de la municipalité pour faire en sorte que le projet puisse avancer.

Et donc effectivement, peut-être que dans certaines villes, il y a cette problématique. Qui plus, la présence musulmane en France est jeune, elle ne date pas si longtemps que ça. Donc objectivement, je dirais qu’il y a une problématique de structuration des musulmans. À partir du moment où cette structuration elle est faite, là après il y a des considérations politiques qui peuvent se faire. Et là, il peut y avoir aussi dans certaines municipalités une volonté de ne pas vouloir de lieu de culte musulman et là c’est un autre sujet politique. Après il y a un positionnement que doivent avoir les communautés musulmanes pour se faire respecter. Et pour se faire respecter, il faut aussi user d’un certains nombres de stratagèmes légaux; pour dire « écoutez on doit se faire respecter, on a besoin d’unité pour avoir un lieu de culte, et donc si on ne se fait pas entendre du point de vue de notre association, ou de notre organisation alors on peu passer sur le plan politique ».  

Les relations générationnelle au sein d’une association sont parfois tumultueuses, il y a une difficulté chez les plus jeunes de faire entendre leurs idées. Comment fonctionnez-vous dans ce domaine ?

Effectivement, il y a un jeu générationnel qui fait que nos anciens qui étaient là ont fait les choses à leur manière. Ils ont parfois mené des projets en lien aussi à leur pays d’origine. Et donc ils ont fait ça d’une certaine manière qui ne convient pas effectivement à la culture aux générations qui suivent, ou de l’environnement dans lequel ils se trouvent actuellement. Il y a des transitions qui sont en train de se faire, mais ça ne va pas se faire du jour au lendemain.

Nous (Conseil Musulman de Massy) avons eu moins ce problème, puisqu’on est quand-même dans une région où beaucoup de gens sont venus d’ailleurs, y compris moi-même. Moi je suis du sud de la France où il y a une mosquée qui a été construite, qui est plus gérée par des anciens. Donc en effet, il est vrai que lorsqu’il y a un état ou une situation établi, c’est difficile de rebattre les cartes, d’aller un peu plus en amont sur des visions qui sont peut-être différentes.

Et là où il y a un vrai défi, un vrai enjeu, c’est qu’il y ait une transition qui se fasse, entre une génération qui arrive et qui doit être à la hauteur. Et en même temps, l’organisation de pouvoir justement bénéficier des anciens et aussi la réalité sociale dans laquelle ont est. Donc, nous avons moins ce problème ici, parce qu’on a des gens qui ont un certain niveau d’organisation qui fait que, on est au-delà de ça. Les anciens, on les a intégré dans notre organisation, et là c’est plutôt des gens comme moi qui ont dans les quarantaine, cinquantaine.

Mosquée de Massy




Réagir à cet article